Ce lundi (7/09) les producteurs de lait étaient en colère et l’ont clairement démontré dans le quartier européen, à Bruxelles. Au même moment les ministres de l’Agriculture se réunissaient en conseil extraordinaire pour décider du futur de la production laitière européenne. Selon Véronique Lefolch, présidente de l’Organisation des Producteurs Laitiers, section laitière de la Coordination Rurale, vu les profits des industriels, le lait pourrait arriver quasiment gratuitement dans les supermarchés.
Qu’êtes-vous venus revendiquer à Bruxelles ?
Véronique Lefolch : Nous sommes venus ici demander la régulation à l’échelle européenne, pour obtenir des prix. On sait qu’on a perdu le marché russe, 1,5%, ce n’est pas beaucoup mais ça réussit à perturber le marché, d’autant plus que les Chinois se sont retirés du marché européen.
Concrètement, pour un litre de lait à 1,45€ au supermarché, qu’est-ce que ça signifie pour vous ?
V.L. Pour nous, c’est un déni de la profession. Ne pas se rendre compte du travail qu’il y a derrière. C’est voler du lait pour en faire un grand bénéfice. Les politiques ruinent les producteurs, mais avec la collaboration des industriels puisqu’ils laissent tout pouvoir à ces lobbys.
Pourriez-vous nous expliquer le cheminement du lait à partir de la matière première, jusqu’au produit fini ?
V.L. Un litre de lait part à 30 voire 20 centimes de la ferme, prix basé sur les cours mondiaux. Le lait est ensuite pasteurisé, écrémé, déminéralisé. Ça coûte de l’argent. Et toutes les matières sèches qui y sont issues, génèrent de l’argent en or. Jusqu’à 15 000 euros par tonne, c’est-à-dire 15 euros le litre. Donc le lait pourrait même arriver pratiquement gratuitement dans les supermarchés. Sauf que nous on demande à ce que le lait y soit bien plus entier, car il ne l’est plus. A la sortie de la ferme il a 40-42 g/l de matière grasse. Un lait entier, au supermarché n’en n’a plus que 35. Donc le consommateur est grugé.
Où va l’argent et quelle est l’intervention des lobbys là-dedans ?
V.L. Que les entreprises soient privées, c’est leur affaire, puisque l’objectif c’est la maximisation des profits. Ils ne publient pas leurs résultats tellement ils sont énormes. Mais on entend un bénéfice doublé pour deux-trois industriels français, dont Bel, Savencia. Lactalis ne publie pas ses chiffres. Les coopératives ont trouvé un tout un autre système, qui, comme les autres, est cautionné par l’Etat puisque la partie coopérative s’arrête à la collecte du lait en ferme. Ensuite, il y a un échelon, voire deux échelons et c’est derrière le dernier échelon que l’on retrouve toutes les entreprises industrielles qui font de la transformation, qui ont le résultat, et qui le gardent.